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MetallicA -
"Four Horsemen... in Black" Part II
Plus
qu'un studio, le "One on One" devient peu à peu une sorte
de laboratoire où manipulations matérielles et expérimentations
sonores
tendent effrontément vers la perfection.
Jaymz
avoue ainsi avoir "piqué" le cor au début de "the
unforgiven" avant de le réarranger puis de le jouer à l'envers.
Lars : "Personne ne sait d'où il vient, je ne vais certainement
pas le dire maintenant !!"
Les enregistrements s'écoulent avec une fluidité naturelle et
néanmoins inespérée. Metallica semble avoir trouvé
la formule...
Lars : "Nous avions auparavant écrit d'autres ballades
comme "Welcome Home" : Les strophes mélodiques étaient
entrecoupées d'un refrain. J'ai pensé que ce serait bien d'inverser."
Bob Rock : "Pour obtenir un son de batterie puissant et "pénétrant",
nous avons utilisé différents micros et beaucoup d'equalizers.
On a poussé Lars le plus possible. (...) On a vraiment passé
des semaines sur la batterie."
Lars
mis à rude épreuve ? Assurément... Souvent ulcéré,
épuisé et à bout de nerfs, Ulrich s'accordait de longues
pauses en prétextant la nécessité d'un changement de
peau. Il va parfois même
jusqu'à planter ses baguettes dans la caisse claire
pour être certain de prendre un break !
Chaque
Horseman souffrira de cette période et Hammett ne dérogera pas
à la règle.
Jouissant alors d'un statut de Guitar Hero qui lui valait la reconnaissance
de l'ensemble des musiciens et de l'industrie du disque, Kirk est bousculé
dans ces certitudes par les inflexibles exigences de son producteur.
Bob : "Nous guidions Kirk parce qu'il avait besoin d'être
guidé".
Les remarques désobligeantes fusent jusqu'à atteindre les limites
de la patience du soliste.
Bob : "Il jouera ce solo jusqu'à ce qu'il soit parfait",
"Viens-en au fait et joue maintenant !", "Vous êtes prêts
? Alors écoutons le solo du guitariste de l'année !"...
La brutalité verbale de Rock va jusqu'à oublier les efforts
fournis par Kirk.
Kirk : "Je n'ai réussi du premier coup que des solos comme
The Unforgiven. J'avais travaillé un solo vraiment compliqué
et je le trouvais très bon mais les autres ont détesté."
Bob
Rock admet en 2001 qu'il a sans doute été stupide d'enlever
cette partie du solo, mais qu'à l'époque, ils faisaient tous
des "trucs idiots".
L'agacement
du producteur vis-à-vis de son guitariste ne passe pas inaperçu
au sein du groupe. Jason confirme d'ailleurs l'amertume et la colère
d'Hammett.
Jason : "Un
jour, il a joué ce solo de rage... c'est celui qu'on a gardé
sur la bande."
Flairant de plus en plus l'énorme potentiel de ce futur album, Bob
Rock commence à pousser tout le monde. La voix de Jaymz, durement sollicitée,
en pâtira gravement.
Jaymz : "Pendant l'enregistrement du black, j'ai littéralement
perdu ma voix. C'est la raison pour laquelle j'y fais très attention
aujourd'hui et que je prends des cours. Je suis allé voir un homme
qui était organiste dans une église... j'avais très peur.
Il était assis derrière son clavier et m'a dit "vas-y chante
!". Je me suis dit que je ne pouvais pas... J'ai alors regardé
ses murs où les disques d'or d'autres artistes étaient suspendus.
J'ai alors pensé que je ne perdais rien à essayer. Il a remis
ma voix en état et j'ai de nouveau pû chanter. De plus, ça
a renforcé ma confiance même si je sais pertinemment que je n'ai
rien d'un chanteur d'opéra."
Lars
: "Ce qui nous différencie réellement des autres groupes,
c'est que Jaymz commence toujours par écrire la mélodie, le
nombre de syllabes par ligne puis les mots."
Jaymz : "Je ne suis pas du genre à lire des poèmes
ou des romans, encore moins à en écrire qui puissent devenir
des chansons comme Phil Lynott, mon parolier favori. Lui sait écrire
de la poésie. Pas moi. (...) La seule alternative pour nous était
de devenir plus universels. Quand on se penche sur les choses de la vie et
qu'on évoque des expériences qui touchent l'existence de chacun,
on ne peut pas se tromper. (...) La simplicité des morceaux permettait
aux paroles de prendre le dessus et c'était plutôt nouveau chez
Metallica."
Bob : " J'ai essayé de mettre Jaymz à l'aise. Il
a fini par aimer et la glace s'est brisée".
Papa Het' sait qu'il doit beaucoup à ce producteur qui l'a fait avancer
en l'encourageant à chanter à la "Hetfield" et en
l'orientant vers d'autres horizons, des styles de chants différents,
d'autres états d'esprits...
Ainsi apparaît "Nothing else matters", née du hasard
alors que Jaymz gratte
quelques cordes à vide, assis
au téléphone avec sa guitare sur les genoux et un correspondant
passionnant comme un documentaire sur les boutures de buissons en Roumanie.
Jaymz : "Je discutais et j'ai commencé à pincer
les cordes de cette façon. J'ai alors pris congé de mon interlocuteur
avant de jouer des accords au dessus de ma trouvaille. J'ai continué
jusqu'à être satisfait du résultat. Nothing parle d'un
homme qui est sur la route et de son amie qui lui manque. La chanson traite
de l'éloignement des attaches.
Les filles vont et viennent mais cette chanson interpelle toujours d'autres
personnes. C'est comme les liens fraternels, pour nous cela a un sens".
Empreinte d'une émotion parfaitement véhiculée par le
timbre si particulier du chanteur aux allures de viking, Nothing n'était
pourtant pas destinée à voir le jour.
Jaymz : "C'était une chanson sur moi et mes sentiments.
C'était bien trop personnel, je pensais que les autres n'aimeraient
pas et qu'ils me diraient "ce n'est pas du Metallica". Je l'avais
écrite pour moi et ils l'ont entendue. Je ne savais plus comment me
comporter. (...) J'ai toujours aimé les arrangement de Brian May :
une note et les harmonies à trois... C'est ce que j'ai fait sur Nothing.
Lars : "C'est un titre pour lequel il était impossible
de fixer des paramètres ou des limites. On pouvait en sortir autant
de choses que l'imagination nous le permettait. Quand Bob a proposé
d'y intégrer un orchestre, je n'avais rien contre".
Jaymz est plus mitigé. Effrayé par cette perspective, il n'a
aucune idée de la manière d'écrire pour un quatuor à
cordes. C'est à Michael Kamen, auteur de nombreuses B.O. et futur instigateur
du projet "S&M" qui verra le jour en 1999, que revient cette
mission d'orchestration.
Kamen : "Je
me suis dit "quoi ? Metallica veut un orchestre ?". C'était
étrange. Je leur ai demandé de m'envoyer le morceau. Je ne savais
pas à quoi m'attendre et je dois bien avouer que même si je connaissais
leur musique, je n'étais pas du tout fan. La chanson en question m'a
vraiment surpris : une ballade ! (...) J'aurais pû me contenter de la
mélodie mais cela aurait été ennuyeux et n'aurait intéressé
aucun orchestre. Nous avons donc fait quelques ajouts, j'ai renvoyé
les bandes et, comme souvent dans le milieu du Rock, le téléphone
n'a pas sonné. Pas d'échos enthousiastes... j'ai pris ça
comme un coup d'épée dans l'eau."
Pourtant, à la sortie du disque, Kamen reçoit de nombreux prix
et participe à la remise des Grammy awards.
Kamen : "Quand Metallica est entré en scène, la
musique était forte et impressionnante. J'ai alors compris que c'était
un grand groupe et je suis allé les voir en coulisses. Je me suis présenté
et ils m'ont affirmé qu'ils avaient adoré ma partition. Je leur
ai alors dit qu'on l'entendait à peine sur le disque et ils m'ont répondu
en sortant quelque chose de leur sac : "Ecoute ça. On l'a appelée
la version "elevator". Elle comportait la voix de Jaymz, une guitare
et l'orchestre. Ils m'ont fait part de leur tendresse pour cette version et
leur envie de la sortir telle quelle (ndlr, elle figure en face b des singles
de Sad but true).
Si l'enregistrement fut laborieux, la phase finale de mixage l'est tout autant.
Il faudra par exemple dix jours pour parfaire Sandman alors que d'autres titres,
sous la contrainte d'un timing plus serré du fait d'un retard déjà
important, ne se voient consacrer que 4 ou 5 heures (cf Holier) ! Pour lâcher
la "Bête Noire" dans les temps, deux salles de mixage s'imposeront
: La première servira à la gestion des prises que Jaymz continue
d'effectuer en parallèle, la deuxième aux shots déjà
en boîte. Cerise sur le gâteau, le tournage du clip de Sandman
et les premières interviews contribueront à créer une
ambiance de stress chaotique insupportable à l'époque... mais
sur laquelle les Mets se retournent aujourd'hui avec nostalgie...
Greg,
Webmaster
Juin 2005